Stress & libido, quels liens ?

Cela fait quelque temps que vous ressentez moins d’envies sexuelles qu’auparavant. Martin (ou martine), avez qui vous partagez régulièrement des parties de jambes en l’air, vous le fait remarquer, et ça devient culpabilisant. Ou bien, vous avez toujours l’impression d’avoir moins de libido que certaines de vos ami.e.s, vous vous enflammez moins au sujet du sexe. Pourtant, vous aimez beaucoup Robert.e. Et puis, c’est pas faute d’avoir essayé de pimper vos nuits d’amour, à base de dessous affriolants, de mots crus, de gingembre et autres tisanes aphrodisiaques, de visionner quelques clichés ou vidéos soit disant émoustillantes, ou que sais-je encore…

Vous finissez par vous convaincre qu’un truc cloche, et que ce quelque chose, c’est forcément vous. Et évidemment, plus vous y songez, moins vous en avez envie. Et si c’était le stress, le coupable ?

La libido, manifestation d’une énergie de vie globale, mais élément complexe

On associe surtout la libido à une histoire de fesses. Mais, en psychologie, la libido se perçoit plus globalement comme une énergie qui sous-tend nos instincts de vie, c’est un peu l’élan, l’en-train que l’on a au quotidien, notre façon de pulser.

La santé de notre libido peut donc nous renseigner sur notre épanouissement personnel GLOBAL. Aussi, quand celle-ci est en baisse, on peut s’interroger : comment pulsez-vous en ce moment ? Faites-vous des choses qui vous font suffisamment vibrer au quotidien ? Est-ce que votre quotidien et vos activités vous apportent une énergie positive qui vous rassasie, ou qui vous en prennent trop et/ou vous ennuient ?

Dès l’instant que l’on retient cette définition, on comprend que des phases de vie éprouvantes de  telles que le deuil, la rupture, le chômage, la maladie, ou des phases de transition telles que la ménopause ou la grossesse puissent retentir directement sur la libido.

Pour autant, on peut vivre un stress moins brutal mais plus chronique, qui peut tout à fait impacter la libido, et ce de façon sournoise puisqu’on le perçoit beaucoup moins.

Le stress chronique et ses impacts physiologiques sur votre désir

Le stress vous fatigue 

Soucis personnels ou professionnels, financiers, charge mentale par exemple liée à la gestion du foyer ou aux enfants, sachant que la journée n’est pas extensible et que vous avez besoin de sommeil comme tout être humain normalement constitué… Le stress quotidien est une réelle source de fatigue pour le corps, et comment dédier de l’énergie à une activité sexuelle quand on en manque soi-même ?

Le stress engendre des douleurs

Le stress ou l’anxiété peuvent engendrer des dyspareunies ou douleurs lors de l’acte sexuel localisées dans la sphère pelvienne. Celles-ci peuvent en effet être engendrées par des micro spasmes musculaires dans la zone du périnée, et résultent d’un stress chronique, rendant la pénétration ou certaines positions très inconfortables.

Ces douleurs peuvent vous faire redouter les prochains rapports, et l’anticipation négative entretient un cercle vicieux : vous avez encore moins envie de faire l’amour.

A l’extrême, certaines femmes connaissent ainsi le vaginisme, qui empêche toute pénétration (ou qui la rend extrêmement douloureuse). Souvent, le vaginisme intervient après des traumatismes sexuels ou chirurgicaux dans la zone, mais pas que.

C’est sans compter que le stress induit fréquemment une sécheresse vaginale chez la femme, ce qui n’est pas pour rendre le rapport des plus agréables, et qui peut accroitre les douleurs (quand cette sécheresse n’en est pas même à l’origine !).

Le stress altère votre équilibre hormonal et l’ovulation chez la femme…

Chez les femmes, le désir est largement conditionné par le cycle menstruel : c’est archaïque, dans un cycle menstruel sain et sans contraception hormonal, votre désir augmente naturellement quand vous êtes fertile, c’est à dire quelques jours avant et après l’ovulation, afin de favoriser la reproduction de l’espèce.

Or, le stress impacte fortement cet équilibre hormonal fragile : si votre cerveau reçoit régulièrement des messages stressants (stimuli nerveux), il va faire comprendre vos hormones par un système de rétro-contrôle, que ce n’est pas le moment pour se reproduire, les conditions n’étant pas idéales puisque quelque chose « menace » votre suivie (vos cellules ont gardé en mémoire qu’un stress = peut-être se faire bouffer par un lion = urgence à gérer, et continuent de réagir de la même façon).

Et comme un malheur n’arrive jamais seul (en vrai, on en rajoute !), vos neurotransmetteurs, eux-mêmes influencés par vos hormones, en prennent un petit coup : une étude parue en 2010 dans l’International journal of women’s health conclue : « les neurotransmetteurs, fortement influencés par les hormones sexuelles (œstrogènes, androgènes, et même progestérone), jouent un rôle clé dans la modulation du désir sexuel (…) L’équilibre net entre les facteurs stimulants et inhibiteurs permet d’éprouver du désir sexuel et, éventuellement, de s’engager dans une activité sexuelle. »

Vous voilà donc, manquant votre pic d’oestrogènes et de testostérone, qui aurait pu vous donner envie d’un 5 à 7 avec Martin.e. Flûte. Bon, si ça peut vous rassurer vous n’êtes pas les seules : les hommes aussi connaissent des rendez-vous manqués avec le stress : trop de stress chez eux peut entraîner des soucis d’érection. Encore un réflexe archaïque : en cas de stress, le sang de monsieur a besoin de pulser surtout dans ses jambes et dans son cerveau pour réagir en cas d’urgence, plutôt que dans son sexe (et oui, une érection n’est rien de plus qu’une manifestation vasculaire !).

Le problème, c’est que quand ce stress devient chronique : le corps ne se sentant pas en sécurité,  la libido peut se mettre en berne pour quelques temps. 

A savoir : l’équilibre hormonal et nerveux sont deux éléments liés à votre hygiène de vie. L’alimentation a un impact majeur sur votre production d’hormones sexuelles et sur vos neurotransmetteurs, mais aussi votre façon de l’assimiler. Il peut être bon de faire le point avec votre naturopathe afin d’évaluer si des ajustements sont nécessaires pour accompagner un retour à une libido satisfaisante.

Le stress et ses impacts psychologiques et mentaux

Vous êtes davantage dans votre tête que dans votre corps

Si vous êtes accaparée par un travail qui occupe votre journée jusqu’au soir et qui sollicite également vos pensées une fois rentrée chez vous (que ce soit par un contexte stressant ou parce que vous êtes passionnée et investie), ou que vous vivez une épreuve personnelle sollicitant énormément de votre temps et de votre énergie, il y a des chances que vous ayez du mal à vous extraire de votre mental, et à vous concentrer sur vos sensations corporelles, ou sur Robert.e qui sort de la salle de bain en petite tenue.

Vous avez moins confiance en vous, ou avez une estime de vous en baisse

Un supérieur hiérarchique qui profite de vous, des clients qui manquent à l’appel, du mal à joindre la deuxième journée qui commence si vous avez des enfants à gérer une fois rentrée chez vous, ou tout simplement la pression sociale fortement induite par les réseaux sociaux ou par notre entourage proche… Il est très facile de voir son estime personnelle dans les chaussettes avec le stress : on pense ne jamais faire les choses assez bien, ne pas être à la hauteur.

C’est sans compter que par ailleurs, le stress chronique peut mener à une prise ou une perte de poids que vous avez parfois du mal à accepter : on voit son corps changer, mais on ne l’a pas décidé. On se compare encore et toujours trop aux femmes sur les réseaux, et on pense avoir un chemin incommensurable à faire avant de se sentir belle et désirable.

Or, on n’a du mal à vouloir partager un moment intime quand l’on n’est pas à l’aise avec son image.

L’impact des traumatismes de l’enfance sur le niveau de stress et la libido

Certaines d’entre vous ont vécu des traumatismes enfants (qu’ils touchent à la sphère sexuelle ou non), qui réactivent un stress permanent et peuvent impacter la libido. C’est ce que l’on appelle le stress post-traumatique. Il est important de se faire accompagner par un psychologue et/ou des professionnels adaptés à votre histoire, qui sauront vous aider à prendre de la distance avec cet ou ces événements afin qu’ils ne perturbent plus votre vie actuelle de façon négative.

En somme, il n’existe PAS de libido parfaite, linéaire, haute en permanence. Elle dépend de chaque femme, et elle fluctue en permanence selon des paramètres multiples : votre statut hormonal, vos évènements de vie, votre estime personnelle, votre disponibilité physique et mentale, votre rapport et votre histoire à la sexualité, à votre corps, vos éventuels traumatismes, votre capacité à lâcher prise et votre niveau de stress… Nos vécus sont relatifs, c’est pourquoi un élément affectera plus ou moins une femme que l’autre.

Une baisse de libido ne doit pas être perçue comme une fatalité, et si celle-ci est liée au stress, vous pouvez vous faire accompagner pour mettre de la distance avec vos émotions ou vos ruminations, retrouver une capacité à lâcher prise, et gagner confiance en votre corps avec votre naturopathe.

Article co-écrit avec Mathilde Pingeot, naturopathe.

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